Le psoriasis et ses comorbidités

Le psoriasis et ses comorbidités

Le psoriasis est apparu longtemps comme une maladie de peau isolée mais des études épidémiologiques internationales ces dernières années ont montré que, surtout pour les psoriasis modérés à sévères, des associations à des pathologies variées étaient plus fréquentes que dans la population générale.

La gravité modérée à sévère du psoriasis est assez vite atteinte puisqu’il s’agit de patients ayant une surface corporelle atteinte de 10 % au moins (une paume et les faces palmaires des doigts représentent 1%).

D’autres critères permettent aussi de juger de ce degré de sévérité qui est net au-delà de 10 :

  • le PASI : calculé selon la rougeur, l’épaisseur, la desquamation et l’étendue des plaques
  • le retentissement sur la qualité de vie du patient (DLQI)

C’est donc dans les psoriasis modérés à sévères que l’on a le plus à craindre les associations à d’autres maladies que l’on appelle des « comorbidités » qu’il faut dépister et traiter. Ces traitements évitent les complications inhérentes à ces pathologies mais aussi améliorent le psoriasis car globalement une meilleure hygiène de vie va de pair avec une réduction de la virulence du psoriasis.

Ces comorbidités sont principalement le syndrome métabolique, le rhumatisme psoriasique, le syndrome dépressif et les conduites addictives.

depression et psoriasis

Le syndrome dépressif est nettement plus fréquent chez les psoriasiques : 30 % en moyenne des patients en sont atteints.

Il faut dire qu’un psoriasis est toujours difficile à vivre. L’expérience de chacun et les études scientifiques montrent que le retentissement sur la vie quotidienne explique en grande partie ces plus fréquentes dépressions. Soulager efficacement le psoriasis les améliore souvent et si ce n’est pas suffisant elles requièrent une prise en charge spécifique (antidépresseur, aide psychothérapeutique).

Pour 60% des patients le psoriasis est aggravé par le stress. La dépression et ses angoisses associées augmentent alors l’intensité de la maladie cutanée et vice- versa. Elle rend les traitements moins efficaces car le manque de confiance dans l’avenir des dépressifs et leur fatigue entraînent une moins bonne observance des traitements du psoriasis.

Le rhumatisme psoriasique atteint 15 à 30 % des psoriasiques selon les études.

Il peut toucher toutes les articulations : colonne vertébrale et articulation sacro-iliaque pour le rhumatisme axial, membres surtout mains et pieds pour le rhumatisme périphérique, gaines des tendons des muscles(enthésites) et parfois association de ces différentes formes.

Il donne des douleurs nocturnes qui passent le matin après un certain temps d’activité (dérouillage matinal d’au moins 30 mn). Il ne faut pas se contenter de prendre un simple antidouleur, le diagnostic doit être posé et le malade traité avant tout par un spécialiste car ces rhumatismes inflammatoires, s’ils sont négligés, altèrent définitivement les articulations touchées et laissent des séquelles.

Il y a maintenant des traitements adaptés à tous les degrés de sévérité et toutes les localisations de ces rhumatismes.

rhumatisme psoriasis

obesite et psoriasis

Les troubles métaboliques sont fréquents et le praticien doit les rechercher systématiquement : hypertension artérielle, surpoids voire obésité, anomalies du bilan lipidique (augmentation des triglycérides et baisse du « bon » cholestérol HDL), glycémie à jeun.

Le syndrome métabolique associe au moins 3 des précédents critères seulement à la limite supérieure de la normale :

    • tour de taille supérieur à 80 cm chez la femme et à 94 cm chez l’homme,
    • tension artérielle supérieure à 13/8,5 mm de HG,
    • glycémie à jeun supérieure à 100mg/dl,
  • triglycérides supérieurs à 150 mg/dl et HDL cholestérol inférieur à 50 chez la femme et 40 mg/dl chez l’homme. Il est 5 fois plus fréquent chez les psoriasiques hommes comme femmes avec une tendance plus importante encore chez ces dernières. Il est plus corrélé à la durée du psoriasis qu’à sa sévérité.

Ce syndrome métabolique non traité expose à un fort risque de complications cardiovasculaires (accident vasculaire cérébral et infarctus du myocarde 2 à 3 fois plus fréquents) et au diabète de type 2, 3 à 9 fois plus fréquent.

Le lien qui relie le psoriasis et le syndrome métabolique est probablement l’inflammation. Pour ces 2 maladies des molécules ayant un rôle très important dans l’inflammation se retrouvent en quantité excessive : le TNF alpha et l’IL- 6. Ils sont sécrétés dans la peau psoriasique mais par les adipocytes (cellules graisseuses) trop développés dans l’obésité. Il s’instaure par ces sécrétions un cercle vicieux entre le syndrome métabolique et le psoriasis. Dans l’expérience médicale quotidienne il n’est d’ailleurs pas rare de voir le psoriasis s’améliorer spontanément avec une perte simple de poids ou des patients qui notent d’eux-mêmes que la virulence de leur maladie cutanée varie en fonction de leur courbe pondérale. Des essais cliniques ont prouvé scientifiquement que la perte de poids améliore le psoriasis.

Comme vous l’avez constaté le surpoids est essentiel dans ces deux pathologies, mais comment l’évaluer autrement que par une simple impression d’être ou non « trop gros ». Les médecins ont inventé un outil fiable et précis qui permet de juger si votre poids pose un problème de santé c’est l’indice de masse corporelle(IMC).

L’IMC est calculé en divisant le poids en kg par la taille en mètre au carré. Grâce à des études, des seuils ont été établis pour évaluer les zones à risque, notamment de maladies cardiovasculaires et de diabète.

L’IMC est une méthode fiable pour les adultes de 20 à 65 ans, mais ne peut pas être utilisée telle quelle pour les femmes enceintes ou qui allaitent, les athlètes d’endurance ou les personnes très musclées.

L’interprétation de l’IMC se fait selon les critères définis par l’Organisation mondiale de la Santé

  • IMC (kg.m-2)
  • moins de 16,5
  • 16,5 à 18,5
  • 18,5 à 25
  • 25 à 30
  • 30 à 35
  • plus de 40
  • Interprétation (D’après l’OMS)
  • Dénutrition
  • Maigreur
  • Corpulence normale
  • Surpoids
  • Obésité modérée
  • Obésité morbide ou massive

Le diabète est donc une complication possible du syndrome métabolique et il est plus fréquent nettement chez les psoriasiques sous sa forme diabète de type 2. Une étude épidémiologique chez des femmes américaines sur 14 ans chez 78000 patientes qui ont commencé le suivi entre 27 et 44 ans met en évidence chez les femmes psoriasiques 63 % de risque en plus de développer un diabète que les femmes non psoriasiques.

Les conduites addictives 

    • Addiction à l’alcool 

Le psoriasis est 3 fois plus fréquent chez les patients suivis pour alcoolisme. Beaucoup de patients remarquent qu’ils présentent des poussées en cas de consommation excessive d’alcool et des améliorations s’ils sont sevrés.

    • Addiction au tabac 

Le risque de développer un psoriasis pustuleux palmoplantaire est 8 fois plus important en cas de tabagisme. Pour les autres formes de psoriasis, selon certaines études épidémiologiques, le risque est 2 fois plus important à partir de 15 à 20 cigarettes par jour. Le tabagisme semble rendre moins sensible aux traitements du psoriasis

Ces addictions semblent aggraver le psoriasis et sont certainement là encore en cercle vicieux avec la maladie qui par la souffrance psychologique engendrée favorise l’entrée dans l’addiction puis rend son sevrage plus difficile.

Tous les jours des articles paraissent mettant plus ou moins d’autres maladies comme comorbidités du psoriasis mais avec des pourcentages d’association beaucoup moins convainquant que pour ces quatre items.

Le psoriasis n’est pas une maladie cutanée isolée.

Elle peut être associée à un syndrome dépressif, un rhumatisme inflammatoire, des troubles métaboliques et des conduites addictives.

Il faut rechercher ces comorbidités et les soigner pour ne pas les voir se compliquer et pour limiter leur effet aggravant sur le psoriasis.

Le psoriasis est une maladie très sensible à l’hygiène de vie (poids, alimentation, tendance aux conduites addictives) qui est importante pour tout le monde mais CAPITALE pour les les psoriasiques.

Auteur : Dr Josiane Parier – dermatologue mixte

Hôpital Saint Louis Paris et dermatologue libérale à Saint Maur des Fossés, membre de ResoPso

12 aout 17