Alerté par le contexte épidémique actuel à Coronavirus, et interpellé par nos patients et nos confrères, le comité scientifique et de recherche de RESO a décidé de se réunir le 5 mars 2020 pour préciser les modalités de prise en charge des patients atteints de dermatoses inflammatoires chroniques (DIC) et traités par immunomodulateurs face à ce nouveau risque sanitaire.
Les immunomodulateurs concernés sont : le méthotrexate, la ciclosporine, les biothérapies anti TNF alpha, anti IL12/23, anti-IL17 et anti-IL23.
Les Recommandations et Caractéristiques du Produit (RCP), ainsi que les données de tolérance issues de la littérature, sont rassurantes quant à l’absence de risque d’immunosupression induite par l’omalizumab, le dupilumab et l’apremilast. Ces molécules sont donc exclues du champ de la présente note d’information.
En l’état actuel de nos connaissances, il n’existe pas d’argument pour penser que la sévérité de l’infection au Covid-19 soit supérieure chez les patients traités par ces molécules. Cependant, le faible recul sur l’épidémiologie de cette maladie et l’existence d’un risque infectieux accru sous immunomodulateurs, nous invitent à une vigilance accrue. Selon les données acquises depuis le début de l’épidémie, cette vigilance doit être particulièrement de mise chez les patients âgés et/ou présentant des comorbidités cardiaques et/ou pulmonaires et/ou diabétiques. Les données épidémiologiques sur la mortalité liée au virus mettent notamment en avant l’âge des patients infectés (14% de décès après 80 ans contrastant avec 0,2 % avant 40 ans). Ceci est bien sûr susceptible d’évoluer rapidement (1).
1- Pour les patients actuellement sous traitement, la Société Française de Dermatologie recommande dans un communiqué récent « de ne pas interrompre ces traitements dans un but PREVENTIF ».
Du point de vue de notre groupe, et en accord avec la position des sociétés savantes concernées par la prescription des immunomodulateurs, il n’est pas opportun d‘arrêter un traitement en cours et bien toléré.
Cette décision doit toutefois être modulée en fonction de la pathologie concernée, de sa gravité, de son contrôle, de son risque de rechute, de l’âge et des comorbidités du patient.
Il revient au professionnel de santé d’apprécier la situation au cas par cas, en concertation avec son patient, et de décider de la conduite à tenir quant à l’arrêt temporaire ou non du traitement immunomodulateur.
Dans le cadre d’un psoriasis cutané bien contrôlé sur le long terme, et prenant en compte la rémanence possible de l’efficacité de la molécule, un arrêt temporaire peut être plus facilement envisagé.
A contrario, cette décision doit être prudemment réfléchie en cas de pathologies à fort risque de rechute telles que rhumatisme psoriasique, hidrosadénite suppurée, ou dermatite atopique sévère.
2- Concernant les initiations de nouveaux traitements : dans la mesure du possible, le groupe conseille de retarder le début d’un traitement car le risque infectieux parait plus important à l’initiation d’un traitement immunomodulateur notamment biothérapies (2, 3).
Chez les patients présentant une infection documentée à coronavirus ou des symptômes évocateurs de cette infection (fièvre, signes respiratoires, toux), ou chez les sujets contacts d’un patient infecté, le traitement immunomodulateur de la dermatose inflammatoire cutanée doit être arrêté sans délai.
Pour les essais thérapeutiques portant sur les biologiques ou les anti-JAK, les laboratoires concernés n’ont pour l’instant émis aucune recommandation, et les inclusions ne sont pas interrompues. Ces informations seront bien sûr réactualisées sur le site dès que la situation évoluera.
Outre les recommandations émises par les autorités de santé et gouvernementales (lavage des mains soigneux et fréquent, mouchoir à usage unique…) il nous parait préférable pour les patients sous traitements immuno-modulateurs, notamment âgés ou présentant des comorbidités, de minimiser le risque d’exposition en évitant les expositions suivantes : sorties festives non nécessaires en milieu public confiné, contacts non nécessaire avec des enfants présentant des signes infectieux des voies aériennes ou respiratoires (crèche, sorties scolaires..).
1- Hellewell J et al. Feasibility of controlling COVID-19 outbreaks by isolation of cases and contacts. Lancet Glob Health. 2020 Feb 28.
2- Ballow M et al. Secondary immunodeficiency induced by biologic therapies. Up to date Feb 2020.
3- Couderc S et al. Infectious risk of biological drugs vs. traditional systemic treatments in moderate-to-severe psoriasis: a cohort analysis in the French insurance database. Fundam Clin Pharmacol. 2018 Aug;32(4):436-449.
Il existe actuellement beaucoup d’incertitudes sur ce nouvel agent viral et ces préconisations sont susceptibles d’évoluer au fur et à mesure de l’avancée des connaissances.